Stray cat strut (The Stray Cats)

I don't bother chasing mice around
I slink down the alleyway looking for a fight
Howling to the moonlight on a hot summer night
Singin' the blues while the lady cats cry
"Wild stray cat, you're a real gone guy"
I wish I could be as carefree and wild
But I got cat class and I got cat style

Quels secrets, quelle vie passée, quelles envies se cachent derrière ces yeux d’un bleu que je qualifierais de « céladon ». Un follower sur Instagram m’a dit que les bretons ont un mot pour cette couleur. C’est « glaz ». Le « glaz » m’a-t-il expliqué, est une nuance comportant du bleu, du vert et du gris, elle est utilisée pour définir les différentes teintes que peut prendre la mer en Bretagne… Évidemment, je valide : c’est breton, donc c’est bon ! Breton un jour, breton toujours, même si j’ai choisi de vivre à Marseille…

Qu’est-ce qui se cache derrière ces yeux ? Qu’est-ce que Scotty a vécu, avant ?
Âgé de 3ans, 3ans et demi, Scotty a déjà fréquenté deux refuges. Et avant ? Je pense que c’est un chaton qui s’est éduqué dans la rue…
Il y a du Harrison Ford dans ce chaton : un côté Han Solo, le bad boy au grand cœur de Star Wars, et un côté Indiana Jones, le baroudeur intrépide qui ne sait pas toujours éviter les emmerdes… Attachant, déconcertant et perturbant.

Il y a trois ans, je me demandais déjà, au sujet d’Asgård, si mon chat était heureux. J’ai les mêmes questions avec Scotty d’autant plus prégnantes que son caractère, ses réactions, son mode de vie sont tellement différents de ce à quoi je m’étais habitué.
C’est facile de dire qu’il n’est pas question de faire des comparaisons oiseuses. Mais c’est aussi tellement évident de se souvenir de la docilité d’Asgård, de son caractère très conciliant, et en regard, constater le côté vif-argent (encore) insaisissable d’un Scotty qui sait avoir la patte leste…
Ma crainte c’est que Scotty ne se sente « contraint » dans un appartement, donc qu’il s’ennuie. Je vais même oser avouer que je me suis demandé si je n’avais pas eu tort de choisir ce chaton très vif, voire si ce ne serait pas plus judicieux de le ramener et de choisir un chat plus pépère.
Et puis…
Et puis Scotty saute sur mes genoux, se vautre sur mon clavier en ronronnant, vient glisser sa tête au creux de ma main… Je fonds !
Et puis je me souviens que j’ai choisi d’avoir un chat, choisi dans un refuge, pour le rendre heureux. Donc patience et longueur de temps…
Ça ne fait même pas un mois qu’il est là. Et durant cette période il y a eu une semaine de travaux, donc de perturbations, voire de stress pour Scotty, alors qu’il n’avait pas encore ses habitudes, qu’il n’était pas « rassuré » sur sa nouvelle vie.
Je vais guetter certaines évolutions. Pour le moment Scotty est un morfale qui mange avec voracité sa pâtée. Qui, si je n’y faisais pas attention, mangerait le double de ce que je lui donne. Au moins, il n’est pas difficile : pâtées à la viande, au poisson, en sauce ou en gelée, croquettes… Tout est bon. Scotty n’est pas un raffiné. Il n’hésite pas à tenter de récupérer des boites de pâtée vides dans la poubelle, des fois qu’il y aurait encore quelque chose à lécher. Il n’hésite d’ailleurs pas plus à voler des sachets pour satisfaire sa gourmandise.
Je vais attendre et guetter le jour où Scotty va m’offrir son ventre blanc à gratouiller…
C’est aussi ce côté bad boy intrépide qui fait que je ne lui ai pas encore donné accès au balcon. Asgård était curieux mais finalement craintif. Je sens que Scotty est plus va-t-en-guerre et je crains qu’un vol de pigeon, par exemple, ne l’excite et ne le pousse à oublier la prudence. Il faut que je fasse installer un grillage sur la loggia. Pour sécuriser Scotty ou pour me rassurer ? Surtout pour me rassurer…

Je suis en train de travailler mes capacités d’adaptation et… et surtout je suis en train de prendre des nouvelles habitudes : fermer la porte du débarras pour interdire l’accès à la nourriture, ranger la poubelle de tri des emballages (une mine de trésors divers et variés pour Scotty), dégager les bibelots les plus fragiles, vérifier la fermeture des placards, repositionner la télé plus près du mur pour interdire l’accès aux câbles… et à la poussière !

Par toutes ces concessions, je ne sais pas si je montre que je suis le plus intelligent ou le plus faible. Mais je reste fidèle à mon mantra ; j’ai recueilli un chat pour qu’il soit heureux !
Faut quand même dire que c’est une boule d’amour, ce chat ! Il suffit qu’il se frotte contre moi en ronronnant et…

(Je finis là ce billet, Scotty a décidé de squatter le clavier !)

Stray Cats – Stray Cat Strut
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Je suis moi (F. Hardy)

…Et la rue m'habitue à n'être plus personne
presque plus personne
et la ville me force à suivre son rythme fébrile
son rythme fébrile
mais quand on se retrouve
quand il rentre le soir
il suffit d'un regard
et je suis moi
j'ai le ciel au bout des doigts
le monde au-dessous de moi
comme pour la première fois
je suis moi

En cherchant un texte que j’avais écrit il y a de nombreuses années, sur mon ancien blog, concernant le poids du regard des autres sur sa propre vie, j’ai retrouvé ce questionnaire… Les réponses datent de septembre 2004. Mises à part la référence au walkman (que je remplacerais par un iPhone) et l’utilisation de mon argent (tournée aujourd’hui vers un projet immobilier), je n’ai rien à changer !

Quand êtes-vous déjà mort ?
Le 06 octobre 1957
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
La force de l’habitude et l’envie de pisser !
Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
Je suis encore un enfant…
Qu’est-ce qui vous distingue des autres ?
Ils sont vivants.
Vous manque-t-il quelque chose ?
L’envie de croire en moi.
Pensez-vous que tout le monde puisse être artiste ?
Oui, chacun à sa façon…
D’où venez-vous ?
Du ventre de ma mère.
Jugez-vous votre sort enviable ?
Sans doute, quand j’arrête de me regarder le nombril.
A quoi avez-vous renoncé ?
A l’optimisme béat et forcené…
Que faites-vous de votre argent ?
Impôts (beaucoup), épargne (un peu) la vie et ses plaisirs partagés ou égoïstes. Je ne me pose pas trop de questions.
Quelle tâche ménagère vous rebute le plus ?
Toutes les tâches !
Quels sont vos plaisirs favoris ?
Somnoler au soleil avec un walkman sur les oreilles !
Qu’aimeriez-vous recevoir pour votre anniversaire ?
Un an de moins…
Citez trois artistes vivants que vous détestez.
Si je les déteste je ne les qualifierai pas « d’artiste »…
Que défendez-vous ?
La liberté de penser… (Garfieldd, nouveau F. Pagny ! yeah!!)
Qu’êtes-vous capable de refuser ?
De dire oui comme les autres.
Quelle est la partie de votre corps la plus fragile ?
Le coeur !
Qu’avez-vous été capable de faire par amour ?
Faire confiance…
Que vous reproche-t-on ?
D’être naïf et immature.
A quoi sert l’art ?
A embellir le réel.
Rédigez votre épitaphe.
« Je serai mort le jour où vous vous arrêterez ici en vous demandant : mais qui est-ce? »
Sous quelle forme aimeriez-vous revenir ?
Revenir? pourquoi faire ?

F. Hardy – Je suis moi (1974)

He’s a pirate (Scotty)

Scotty – He’s a pirate / BOF – Pirate des Caraïbes II
Scotty, 5 ans, FIV+
Ce petit amour espiègle n'est pas conscient d'être un félin… c'est un véritable petit toutou qui répond et vient en courant lorsque vous l'appelez !
Scotty, est un chat tout doux, tout câlin et tellement rigolo.
Du bonheur assuré chez vous !
Et ça tombe bien, ce beau gosse est à adopter, venez le rencontrer !

Quand j’ai vu cette fiche de présentation, je me suis dit « pourquoi pas ? »
J’ai appris finalement qu’il avait 3 ans (parce que septembre 2019 / janvier 2023, mathématiquement c’est plus proche de 3 ans que de 5 ans…)
Aucun rapport, aucune ressemblance avec Asgård… Évidemment, même si on se dit qu’on ne va comparer, qu’il ne faut pas comparer, l’image et les souvenirs heureux (et déchirants) de mon chaton m’accompagnent dans ma démarche…

Si on met à part le fait qu’il est positif au FIV, Scotty n’a aucun point commun avec Asgård : poils courts, tigré et blanc, silhouette fine… Même de profil Scotty est différent avec un « stop » (la liaison entre le front et le museau) très peu marqué. Asgård était finalement très placide, très docile, très « pépère » alors que Scotty m’est apparu tout de suite comme vif, aventureux et enjoué. Après une journée passée avec lui je dirais même qu’il a un côté « bad boy » déluré.

En arrivant au refuge, la bénévole avec qui j’avais échangé par téléphone, m’a déclaré qu’elle allait me présenter d’autres chats « qui pourraient me convenir ». J’ai refusé… Je suis venu voir Scotty en priorité avec toujours le sentiment qu’un chat porteur du FIV, le « sida des chats » est plus difficilement adoptable. Dans mon esprit c’est à Scotty de m’accepter, si ce n’est pas le cas, on regarde ailleurs… Avec cette façon de concevoir l’adoption, je suis évidemment surpris voire choqué par le comportement des familles adoptantes qu’on peut voir dans l’émission de C8 « Animaux à adopter, nouvelle famille ». On y voit des familles qui viennent dans un refuge qui regardent et comparent plusieurs animaux avant de faire leur choix. Un peu comme on ferait dans une concession auto pour choisir son véhicule en fonction de la couleur de la carrosserie et des options de l’habitacle… Les animaux ressentent les situations d’abandon, alors comment ne seraient-ils pas sensibles également au fait de ne pas être choisis, d’être abandonnés silencieusement une nouvelle fois… De mon côté, je ne pourrais pas affronter le regard d’un animal que je délaisserais au profit d’un autre.

L’adoption c’est un peu comme la drague dans un bar gay : tu discutes avec un mec avec qui tu aimerais que ça matche, et puis tu vois qu’il regarde par dessus ton épaule… et il finit par te quitter avec un grand sourire en te disant « on se voit tout à l’heure ? ». Et puis la soirée se termine et tu restes au bar, seul, comme un con. Forcément un peu (beaucoup) malheureux. Je suis souvent resté comme un con, sur mon tabouret, avec parfois l’espoir que le « tout à l’heure » ne serait pas qu’une formule de politesse…

On est donc allé voir Scotty. Je l’avais choisi, avec mon cœur et ma tête, mais c’est à lui que revenait la décision. Je me suis accroupi. Il a accouru vers moi, il a glissé sa tête dans ma main en se frottant contre moi… et sans que j’ai le temps de m’y préparer, il a sauté sur mon épaule, il est resté quelques secondes autour de mon cou en ronronnant.
J’en ai déduit qu’il m’avait adopté.

Sur le trajet de retour, il a miaulé. Pas des miaulements de colère ou d’inquiétude si j’en juge par les regards qu’il m’adressait. Mais il a beaucoup miaulé. C’est un chat bavard, là encore totalement différent d’Asgård qui miaulait peu et avec retenue, à mi-voix pourrait-on dire…
Arrivé à la maison, Scotty s’est tu. Il est resté circonspect, l’oreille en alerte, humant l’air, l’attitude inquiète quand il captait un bruit inconnu… Et puis il a repéré les croquettes. Ce qui a eu l’air de le rasséréner un peu.

Il a sauté sur le fauteuil, sur la table, sur le dossier du canapé pour regarder dehors. Il a monté l’escalier prudemment. A inspecté sous le lit. A sauté sur le lavabo dans la salle de bains.
Il a observé prudemment son reflet dans le miroir. Il a testé le moelleux de la couette. Je l’ai appelé pour redescendre dans la pièce principale, il a accouru et a apprécié la pâtée, manifestant même de l’impatience alors que j’ôtais l’opercule de la barquette…

Je l’ai laissé faire ses découvertes pendant le reste de la journée, me contentant de le photographier et d’inonder les réseaux sociaux de ses images…

Faire ses découvertes ça veut dire, trouver un passage sous le meuble de la salle de bains pour se caler tranquillement dans un tiroir au milieu des draps de bains pendant que je le cherche pendant un bon quart d’heure… (J’ai été à deux doigts d’ouvrir le réfrigérateur pour m’assurer que je ne l’avais pas enfermé par erreur !).
Faire ses découvertes, ça veut dire aller explorer les dessous du canapé et se reposer sous le mécanisme qui permet la position relax. Et en sortir bienheureux, couvert de poussière.
Faire ses découvertes, ça veut dire se glisser derrière la télé au risque de la faire basculer… ça veut dire sauter sur le meuble à l’entrée et faire tomber les papiers qui le gênent.
Faire ses découvertes ça veut dire se conduire – comme je l’écrivais en introduction – en « bad boy » déluré.

Je l’aime déjà…

.

Le petit chat est mort…

Trois ans, pas un jour de plus. J’avais rêvé d’un autre anniversaire.
Asgård est parti aujourd’hui.
Il ne mangeait plus depuis 4 jours. Il allait régulièrement boire, restant prostré de longues minutes devant la gamelle, lapant parcimonieusement quelques gouttes d’eau à chaque fois. Mais il refusait la nourriture. Même mon doigt trempé dans la gelée des pâtées ne suscitait plus d’intérêt…

Je l’ai regardé souvent, longtemps, guettant le moindre signe de malaise ou de souffrance. Il est resté beau jusqu’au dernier moment.

Un rendez-vous avec la vétérinaire avait été fixé pour ôter les points de suture suite à la biopsie. Ce matin, j’ai téléphoné pour indiquer que le but du rendez-vous serait peut-être autre. J’ai réussi à articuler quelques mots d’explication au milieu de mes sanglots.

En fait, j’ai pleuré souvent depuis 4 jours. Dès que je parlais d’Asgård, ma gorge se serriont et j’avais les yeux qui mouillont comme aurait dit S. Rousseau. Dès que je regardais Asgård prostré, les papattes bien rangées sous lui, dès que je lui parlais, dès que je le voyais me regarder… je pleurais.
Plusieurs fois j’ai cru qu’il allait partir, quand il allait se réfugier dans le débarras, dans la douche, dans son abri bricolé avec deux cartons… A petits pas, quand je prenais conscience de son absence, j’allais voir. Je cherchais. Et je le trouvais, hiératique, immobile, les yeux mi-clos. Et il revenait dans le salon, se lover sur mon fauteuil devenu notre fauteuil. Plusieurs fois il m’a offert son ventre à caresser. Et je l’ai caressé. J’ai gratouillé le dessous de son menton, l’arrière de ses oreilles. En espérant qu’il ressentait toute la tendresse que j’avais pour lui.
Cette nuit, il est venu dormir, sur la couette, à mes pieds. Ce matin il n’y était plus et j’ai eu peur… Mais non, il était silencieusement descendu se cacher dans son carton préféré.

Je m’en suis voulu de penser que ce serait bien qu’il « parte » avant le rendez-vous chez la véto. Partir en étant chez lui, et non pas à cause d’une piqûre. On projette tant de sentiments humains sur une petite bête qu’on va perdre. Ce n’est pas rationnel, je le sais. En fait j’espérais ne pas avoir à prendre LA décision fatale, puisqu’il était évident que la fin était proche.
J’ai tellement culpabilisé quand ces pensées me venaient. Je ne voulais pas sa mort, elle était là de toute façon. Mais je voulais pouvoir l’accompagner au mieux.

Savait-il ? il a passé la dernière demi-heure sur mes genoux, avant que je ne sorte son panier de transport. Il m’a offert le plaisir de le caresser longuement une dernière fois…

Le rendez-vous avec la vétérinaire a été assez simple : « Dites-moi si Asgård souffre ? Même si ça me fait mal de le voir comme ça, si ce n’est pas mauvais pour lui de rentrer à la maison, je le garde jusqu’à la fin, mais s’il souffre… »
Elle l’a palpé, a regardé ses yeux. Elle m’a dit que le foie était gravement atteint. Qu’à l’évidence il devait aller mal et souffrir même sans miauler ou griffer…
« Alors on fait ce qu’il y a à faire… »

J’ai dit ça très vite, à mi-voix, les yeux pleins de larmes.
J’ai continué à caresser mon chaton pendant que la véto faisait la piqure de tranquillisant. Quelques minutes plus tard, Asgård était étrangement apaisé… la véto m’a demandé si je voulais rester.
Je suis resté. Deuxième piqure. Elle a sorti son stéthoscope, et m’a fait un signe de tête imperceptible. Trois minutes plus tard, Asgård était parti. La seule chose que j’ai remarquée, ce sont ses pupilles qui se sont insensiblement dilatées.
J’ai signé deux papiers, et je l’ai laissé sur la table d’auscultation.

C’est fini.
Je garderai les souvenirs, les photos, l’envie de glisser mes doigts dans ses poils longs.
Pour le moment je pleure…
Ce n’est pas ce que j’avais imaginé pour célébrer l’anniversaire de cette rencontre, il a 3 ans, entre Asgård et moi…